
Après des mois, parfois des années d’isolement sous emprise, revenir vers les autres peut être aussi libérateur qu’effrayant. Une fois loin de la violence, une autre forme de poids peut apparaître : la honte.
Honte d’être restée. Honte de ne pas avoir vu. Honte de ce que l’on a accepté, subi, caché. Honte d’avoir coupé les ponts avec ses proches. Honte de ne pas réussir à « revenir à la normale ». Et cette honte-là est souvent silencieuse et tenace. Mais elle n’est pas la tienne.
Pourquoi la honte s’installe ?
Parce que l’isolement vécu dans l’emprise est profond.
Parce que l’agresseur a peut-être dévalorisé chaque geste, chaque parole, chaque pensée.
Parce que la société culpabilise encore trop souvent les victimes.
Parce qu’on a peur du regard des autres, de leurs questions, de leur gêne, de leur jugement.
Parce que le silence et la solitude ont laissé des traces. Mais la honte n’est pas une preuve de faiblesse. C’est la trace d’un traumatisme. Un symptôme, pas une vérité.
Tu n’as pas à avoir honte de ce que tu as vécu
Tu n’as pas à justifier tes choix, ni à te faire pardonner d’avoir survécu.
Tu as vécu ce que tu as pu vivre, avec les moyens que tu avais à ce moment-là.
Tu as fait ce que tu as pu pour rester debout dans un contexte dangereux, flou, hostile.
Et tu es encore là.
Ce que tu as vécu n’est pas une faute. Ce que tu ressens n’est pas une faiblesse.
Des pistes pour apprivoiser cette honte

Voici quelques pas, à ton rythme, pour te libérer doucement du poids que tu portes :
1. Reconnaître la honte, sans la laisser tout envahir
Tu peux dire : “J’ai honte.” Et en même temps : “Je sais que cette honte ne m’appartient pas.”
Nommer ce que tu ressens ne le renforce pas, au contraire : cela te rend actrice.
2. Revenir au corps, par la douceur
La honte fait se replier, se cacher, se sentir sale, inexistante.
Un simple geste peut réparer un peu de présence à toi :
- une douche chaude prise pour toi,
- un vêtement que tu aimes,
- un mouvement doux,
- un souffle profond.
Petit à petit, tu peux réhabiter ton corps, avec bienveillance.
3. Reprendre contact avec des personnes sûres
Ce n’est pas évident. Mais parfois, une seule personne fiable suffit pour relancer le lien.
Quelqu’un qui ne juge pas, qui accueille, qui écoute.
Même par message. Même de loin. Même si tu ne dis pas tout.
Tu peux aussi rejoindre un groupe de parole, une association, un cercle de femmes.
La honte diminue quand on se rend compte qu’on n’est pas seule.
4. Écrire ou parler pour poser les mots
Tu n’as pas à raconter tout ce que tu as vécu. Mais tu peux écrire ce que tu ressens, même si c’est flou, douloureux, irrationnel.
Tu peux parler à toi-même. Ou à une thérapeute. Ou à une amie.
Dire “j’ai honte” à haute voix, c’est déjà alléger le poids invisible qu’elle représente.
5. Te rappeler que tu es en train de guérir
La honte n’est pas toi. C’est ce que ton agresseur a voulu que tu ressentes pour t’éteindre. Mais tu es là. Tu avances. Tu réfléchis. Tu cherches à comprendre. Tu tends la main, ne serait-ce qu’en lisant ces mots. Et ça, c’est déjà une réparation en soi.

Conclusion : la honte s’efface dans la lumière, pas dans le silence
Tu n’as pas à t’excuser d’avoir été blessée. Tu n’as pas à cacher ce que tu as traversé. Tu peux marcher tête haute, même les jours où ton cœur tremble encore. Tu n’as pas à avoir honte d’avoir survécu. Et chaque jour un peu plus, tu peux revenir vers toi, vers les autres, vers la vie.
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