Être témoin, sans pouvoir agir à sa place

On parle souvent, et heureusement, des victimes de violences conjugales. Mais on parle encore trop peu de ceux et celles qui les aiment : amis, sœurs, parents, collègues, voisin·es… Tous ces proches qui voient, qui pressentent, qui s’inquiètent — et qui parfois ne savent pas quoi faire.

Car être proche d’une femme victime de violences conjugales, c’est souvent vivre un mélange de peur, d’impuissance, de frustration, de colère, d’épuisement… et parfois même de culpabilité.

Les proches vivent aussi des montagnes russes émotionnelles

Ils peuvent :

  • Se sentir impuissants, en voyant leur sœur, amie, collègue souffrir sans pouvoir la protéger ;
  • Se remettre en question : “Pourquoi elle ne m’écoute pas ?”, “Qu’est-ce que je fais de mal ?” ;
  • Avoir peur pour elle, mais aussi parfois pour eux-mêmes (notamment en cas de menaces ou d’agresseur connu) ;
  • S’épuiser émotionnellement, à force de tendre la main, de rassurer, de conseiller, sans retour clair ;
  • Se sentir mis à l’écart, lorsque la victime coupe les liens sous l’effet de l’emprise ;
  • Être jugés s’ils “interviennent trop” ou “pas assez”.

Ce qu’il faut savoir pour mieux comprendre

1. L’emprise rend les choses confuses.

La personne victime peut minimiser, nier, défendre son agresseur ou même en vouloir à ceux qui essaient de l’aider. Ce n’est pas qu’elle ne vous fait pas confiance : c’est qu’elle est sous emprise, et qu’elle essaie de survivre à sa manière.

2. Elle ne reste pas parce qu’elle est faible, mais parce qu’elle est en danger.

Quitter un conjoint violent est un risque réel. Ce n’est pas une simple décision, c’est souvent un parcours complexe, long, semé de peur et d’incertitudes.

3. Elle a besoin de soutien, pas de pression.

Ce qu’elle vit est déjà très lourd. Les jugements ou les ultimatums (“si tu ne pars pas, je ne veux plus t’entendre”) peuvent renforcer son isolement.

Comment soutenir une victime, quand on est proche ?

Voici quelques pistes concrètes, simples mais puissantes :

  • Répéter qu’on est là, inconditionnellement. Même si elle s’éloigne, même si elle retourne vers lui, même si elle se tait. Savoir que vous resterez un repère fiable est un ancrage précieux.
  • Écouter sans forcer. Parfois, une oreille qui n’interrompt pas vaut plus qu’un bon conseil.
  • Valider ses émotions. “Tu n’es pas folle.” – “Tu as raison d’avoir peur.” – “Ce que tu ressens est légitime.”
  • Ne pas dénigrer directement l’agresseur. Cela peut la pousser à se refermer ou à prendre sa défense (stratégie de survie fréquente).
  • Proposer de l’aider dans des tâches concrètes. Chercher une association, garder les enfants, imprimer des documents, aller avec elle à un rendez-vous…
  • S’informer soi-même sur les mécanismes de l’emprise et de la violence conjugale. Cela permet d’agir avec plus de justesse.

Et si on se sent dépassé ?

C’est normal. Vous avez le droit, vous aussi, de ressentir de la colère, de la fatigue, du chagrin.

N’hésitez pas à en parler à un professionnel, à une association, ou à prendre du recul quand c’est nécessaire. Cela ne veut pas dire abandonner — cela veut dire se préserver pour pouvoir continuer à soutenir.

Conclusion : rester un repère, même dans la tempête

Vous n’avez pas à tout porter. Vous n’avez pas à tout comprendre. Mais votre présence, votre patience, votre douceur peuvent faire toute la différence. Vous n’êtes pas seul·e non plus. Il existe des ressources, des outils, des réseaux pour vous aussi. Et si vous aimez une femme victime de violences, sachez que votre attention, même silencieuse, est une lumière dans son brouillard.

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