Quand une femme est victime de violences conjugales, la priorité est souvent de protéger ses enfants, parfois même au prix de son propre silence ou de son propre bien-être. Pourtant, les enfants ressentent, entendent, comprennent bien plus qu’on ne le pense. Parler de la situation avec eux, les rassurer et les inclure dans une démarche de sortie de la violence est essentiel, pour leur sécurité comme pour leur construction.

Voici un petit guide pour accompagner cette démarche difficile mais profondément salvatrice.
1. Les enfants sont toujours affectés, même s’ils ne voient pas tout
Il est important de ne pas sous-estimer l’impact des violences conjugales sur les enfants. Même s’ils ne sont pas directement visés, ils entendent les cris, ressentent la tension, perçoivent les peurs. Cela peut provoquer chez eux :
• troubles du sommeil ou de l’alimentation
• anxiété, repli sur soi
• agressivité ou hypervigilance
• difficultés scolaires ou sociales
• sentiment de culpabilité ou de confusion
Ce que l’on croit cacher « pour leur bien » peut en réalité les blesser plus profondément encore. En parler leur permet de mettre des mots sur ce qu’ils vivent et de comprendre qu’ils ne sont pas responsables de ce qui se passe.
2. Comment aborder le sujet avec ses enfants ?
Il n’est jamais facile d’expliquer une situation de violence, surtout quand elle implique un parent. Mais il est possible de le faire avec des mots adaptés à leur âge, en évitant de les écraser sous le poids des responsabilités.
Ce qu’il est important de dire :
• « Ce que tu entends/vois à la maison n’est pas normal ni acceptable. »
• « Ce n’est pas de ta faute. Tu n’es responsable de rien. »
• « Tu as le droit de te sentir triste, en colère, ou perdu. »
• « Je suis là pour toi. Et je cherche des solutions pour que tout aille mieux. »
• « Papa (ou le compagnon) a un comportement violent, et c’est interdit. Ce n’est pas de l’amour. »
Ce qu’il faut éviter :
• Les faire choisir entre leurs parents
• Les surcharger d’informations qu’ils ne peuvent pas gérer
• Les utiliser comme confidents ou témoins principaux (ce rôle revient aux adultes de confiance ou aux professionnels)
3. Préparer une sortie sécurisée, avec les enfants
Sortir de l’emprise d’un conjoint violent est déjà une épreuve immense. Le faire avec des enfants demande encore plus de préparation, de discrétion et de soutien.
Voici quelques étapes clés :
• Se faire accompagner : par une assistante sociale, une association spécialisée (comme le 3919), ou un avocat. Vous n’êtes pas seule.
• Prévoir un plan de sécurité : avoir des copies de documents importants, des affaires essentielles pour les enfants, un lieu de repli sécurisé (amis, famille, foyer d’accueil). Ne pas annoncer le départ au conjoint violent surtout s’il est impulsif et imprévisible.
• Protéger l’aspect juridique : certaines associations peuvent aider à saisir le juge aux affaires familiales pour obtenir une ordonnance de protection, suspendre l’autorité parentale, ou organiser une garde adaptée.
4. Après le départ : accompagner les enfants dans la reconstruction
Les enfants peuvent ressentir une ambivalence forte : soulagement d’être en sécurité, mais tristesse, colère ou confusion vis-à-vis du parent violent.
Il est fondamental de :
• les laisser exprimer ce qu’ils ressentent, sans les juger
• leur répéter qu’ils ne sont pas responsables
• maintenir autant que possible des repères stables et rassurants
• envisager un accompagnement psychologique, même court, pour les aider à digérer ce qu’ils ont vécu
• leur parler de leurs droits et des limites à ne jamais dépasser dans une relation
5. Bâtir un avenir sans violence
Une mère qui sort avec ses enfants d’un climat de violence conjugale offre un message puissant : on a le droit de dire non, de se protéger, de choisir une vie saine et respectueuse.
Cela ne se fait pas sans douleur, sans étapes, sans doutes. Mais petit à petit, avec du soutien, le lien parent-enfant peut se renforcer, devenir un espace de résilience et d’amour retrouvé.
Ressources utiles
• 3919 – Violences Femmes Info : écoute gratuite et anonyme, 24h/24
• France Victimes (116 006) : soutien juridique et psychologique
• Associations locales (CIDFF, Solidarité Femmes, etc.)
• Équipes éducatives et psychologues scolaires : pour alerter et accompagner les enfants dans le cadre scolaire
• Maison des femmes / structures spécialisées dans l’accueil des victimes
Conclusion
Aborder les violences conjugales avec ses enfants demande du courage, de la douceur et beaucoup d’amour. Mais c’est aussi une étape essentielle pour rompre le silence, restaurer la confiance, et montrer l’exemple d’une vie possible sans peur, sans violence.
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