Dans de nombreuses sociétés, les femmes ont été longtemps considérées comme inférieures aux hommes, juridiquement, socialement et économiquement. Les traces de ce passé persistent, même si les lois et les droits ont évolué. Les stéréotypes de genre restent profondément ancrés : les hommes sont encore souvent socialisés à valoriser le pouvoir, la domination et le contrôle, tandis que les femmes sont encouragées à la patience, à la compréhension et au sacrifice pour le couple ou la famille.

Les violences conjugales ne relèvent pas d’une « perte de contrôle », mais bien, au contraire, d’une volonté de contrôle. L’agresseur cherche à dominer l’autre par la peur, l’humiliation, l’isolement ou encore la manipulation. Or, dans une société où les hommes sont socialement plus souvent placés en position de domination – que ce soit au travail, dans l’espace public, ou dans la sphère familiale – ce sont majoritairement eux qui utilisent la violence comme levier de contrôle.

Les violences conjugales ne sont pas seulement physiques : elles sont aussi psychologiques, sexuelles, économiques. Toutes ont pour but d’imposer une forme de pouvoir. Les hommes violents puisent souvent dans un modèle de masculinité où l’autorité masculine est banalisée, voire légitimée, parfois même au sein de leur entourage ou dans certains médias. La violence masculine n’a pas de complexe : les discours misogynes et masculinistes sont légion, légitimés par les puissants, tandis que les féministes les plus engagées sont généralement moquées et mises de côté.

La domination imposée par les hommes aux femmes est viscéralement liée à leur envie d’assouvir leurs pulsions physiques, depuis toujours légitimées, présentées comme un « besoin » naturel. Lorsqu’un homme n’a pas accès à des relations sexuelles jugées suffisantes, on parle de « misère sexuelle ». Cette expression inverse les rôles en plaçant les hommes comme victimes de rapports physiques inégaux. Dans cette optique, les femmes seraient, elles, riches du désir des hommes… Cette idée laisse penser que la violence des hommes contre les femmes serait justifiée par une sorte d’injustice naturelle qu’il s’agirait de compenser.

il faut encore ajouter l’importance accordée à une vision de la vie dans laquelle un homme n’est pas complet ou n’a pas réussi s’il « n’a pas de femme ». La femme devient une ressource essentielle, une possession indispensable. Alors, quand elle décide de partir, la rupture est vécue par l’homme comme une atteinte à ses droits et un affront à ses efforts pour construire la vie qu’il voulait. Le sentiment de trahison et de dépossession devient si intense qu’il pousse les individus à « se faire justice » en se vengeant de la femme qui, dans l’esprit de l’homme, lui appartenait de droit et lui a été retirée.

Malgré les progrès dans la prise de conscience collective, les violences conjugales sont encore largement banalisées. Les victimes peuvent être culpabilisées ou minimisées : « c’est un conflit de couple », « elle l’a provoqué », « c’est un homme nerveux ». Ces discours contribuent à invisibiliser la réalité des violences et renforcent la difficulté des femmes à demander de l’aide.

En outre, de nombreuses femmes restent prisonnières de la violence faute de ressources économiques, de soutien social ou par peur pour elles-mêmes et leurs enfants. Cette vulnérabilité est souvent accentuée par les inégalités de genre structurelles : salaires inférieurs, précarité, dépendance économique ou administrative.

La banalisation de la violence faite aux femmes jusque dans leur couple n’est pas seulement la conséquence d’un manque de conscience collective quant à l’ampleur et à la gravité du problème. Elle est organisée, orchestrée et protégée par ceux à qui elle profite. C’est pourquoi nous nous engageons à nous battre contre l’invisibilisation et la solitude de la souffrance féminine.

Il existe aussi des hommes victimes de violences conjugales. Cependant, ils représentent une minorité statistique. Les études convergent pour montrer que, dans l’écrasante majorité des cas, les femmes sont les victimes et les hommes les auteurs. Cette réalité ne signifie pas que les hommes victimes doivent être ignorés, mais elle ne doit pas masquer l’ampleur du phénomène qui touche d’abord les femmes.

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