Après la tempête, le besoin de tendresse et de sécurité

Quand on parvient à sortir d’une relation marquée par la violence conjugale, la priorité devient souvent la même pour toutes les mères : protéger ses enfants, et reconstruire ensemble un quotidien apaisé.

Mais la reconstruction ne se fait pas d’un coup. Elle se fait petit à petit, dans les gestes du quotidien, dans les silences rassurants, dans les mots qu’on ose dire, et dans ceux qu’on choisit de ne plus dire.

Et parfois, il faut réapprendre à vivre ensemble autrement, après des mois ou des années passés sous tension.

1. Comprendre ce que vivent les enfants

Même s’ils n’ont pas été directement frappés, les enfants sont toujours affectés par les violences conjugales. Ils peuvent :

  • se montrer très calmes ou au contraire très agités,
  • avoir du mal à dormir, à se concentrer, à faire confiance,
  • vouloir protéger leur mère, ou lui en vouloir sans comprendre pourquoi,
  • rester silencieux, ou poser des questions difficiles,
  • porter des émotions qu’ils ne savent pas exprimer.

Rien de tout cela n’est “anormal”. Ce sont des réactions de survie. Et ils ont besoin de temps, de constance et de sécurité pour commencer à se sentir mieux.

2. Se reconstruire soi, pour mieux les accompagner

Ce n’est pas égoïste de penser à toi. C’est essentiel. Un enfant qui voit sa mère s’apaiser, reprendre confiance, retrouver de la joie, c’est un enfant qui se sent autorisé à aller mieux aussi.

Tu n’as pas à être parfaite. Tu n’as pas à tout faire. Tu as juste à être là, à ton rythme.

→ Chaque jour, choisis un petit moment rien qu’à toi (5 minutes de silence, une tasse chaude, une page d’écriture, une chanson que tu aimes…). Cela te rappelle que tu existes encore en dehors de la violence.

3. Recréer un climat de sécurité émotionnelle

L’objectif n’est pas d’effacer ce qui s’est passé, mais de créer un espace où les enfants peuvent être eux-mêmes, sans peur ni tension.

  • Des routines stables (repas, coucher, moments de détente ensemble).
  • Un coin calme dans la maison, même tout petit, où l’on peut souffler.
  • Des phrases-références, à redire souvent :
    – “Tu es en sécurité ici.”
    – “Tu as le droit de ressentir ce que tu ressens.”
    – “Ce n’était pas ta faute.”
  • Un rituel de fin de journée, même court : un câlin, un dessin, une lumière douce, une phrase rassurante.

4. Ouvrir un espace de parole… sans forcer

Parler, c’est important. Mais ça doit rester un choix, pas une obligation.

Tu peux ouvrir la porte, sans l’imposer :

  • “Si tu veux parler de ce qu’on a vécu, je suis là.”
  • “Tu peux aussi dessiner, ou juste rester avec moi.”

→ Créer une “boîte à émotions” : une petite boîte où chacun peut glisser un mot, un dessin, une question, une colère… que l’on ouvre ensemble de temps en temps, pour échanger avec douceur.

5. Réintroduire du jeu, du lien, de la joie

La reconstruction passe aussi par le plaisir partagé.

Les enfants, comme les adultes, ont besoin de retrouver des moments de légèreté.

  • inventer une chanson ensemble,
  • fabriquer quelque chose avec les mains (pâte à modeler, bricolage, cuisine),
  • aller observer la nature, même en ville (ciel, arbres, oiseaux…),
  • rire devant un film, faire un jeu de société sans enjeu.

Ces moments créent de nouveaux souvenirs. Ils réparent le lien abîmé par le stress et la peur.

Les enfants peuvent tester les limites après une période d’instabilité. C’est normal : ils cherchent à vérifier si le monde est enfin prévisible.

  • Expliquer clairement les règles (“ici, on ne crie pas sur les autres”, “on se respecte, même quand on est en colère”).
  • Valider leurs émotions, même si on pose une limite (“Je comprends que tu sois en colère. Tu as le droit d’être fâché, mais tu ne peux pas taper”).
  • Être régulière, sans se juger : il vaut mieux une petite règle tenue, qu’un grand projet qui t’épuise.

7. Demander du soutien : tu n’es pas seule

Tu n’as pas à tout porter. Tu peux t’appuyer sur :

  • des associations spécialisées,
  • des groupes de paroles,
  • un.e psychologue pour toi, pour ton enfant, ou pour tous les deux,
  • des allié·es dans ton entourage, même juste une personne qui t’écoute sans juger.

Conclusion : tu es déjà en train de réparer

La reconstruction avec tes enfants ne suit pas un modèle parfait. Il y aura des hauts et des bas, des larmes et des rires, des doutes et des élans. Mais tu es déjà sur le chemin. Chaque fois que tu poses une parole douce, chaque fois que tu choisis le calme, chaque fois que tu prends soin de toi ou d’eux — tu répares quelque chose. Et cette réparation-là, c’est aussi une transmission : celle du courage, de la dignité retrouvée, de la possibilité d’un futur plus doux.

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